ScorpiGibus a écrit :
Mais c'est aussi un risque de ce mettre au tas en disant que pour finir ça tient pas trop mal.
Et on se demande pourquoi on est tombé ...
Je refuse la fatalité. Dire "ça
glisse, on risque de tomber", c'est implicitement accepter que si on tombe, c'est la faute à pas de chance : ben oui, ça
glisse, pas d'ma faute. Et ben non ! Si on
glisse, sous la flotte, c'est qu'on a fait une bêtise. C'est qu'on a fait (ou n'a pas fait) un truc qu'on n'aurait pas du.
Après, quand je dis que sur le mouillé ça tient aussi bien que sur le sec, je rajoute toujours
si on reste souple sur les commandes. Si on se demande pourquoi on est tombé, le trio de tête :
- mauvaise position (on a verrouillé les bras, on ne serrait pas les genoux, on avait les pieds sur les commandes au lieu des repose-pieds) ;
- on a braqué la machine (on s'est redressé trop vite, on a freiné trop fort, on a accélérer trop fort) ;
- le regard était pas bon (on a regardé droit devant soi au lieu de diriger la moto).
Si ces trois trucs là étaient parfait, et que tu es quand même tombé, c'est que la chute était inévitable et avait une autre cause que simplement "pas de chance" (genre on a attaqué le virage beaucoup trop vite).
Après, tu n'es pas à l'abri d'une grosse flaque de gasoil (ou de la terre, ou des feuilles, ou la plaque d'égout, ou...), surtout si ça fait longtemps qu'il n'a pas plu. Bon, oui, là... à part serrer les genoux, salir son caleçon et attendre que ça raccroche, y'a pas grand chose à faire (seulement penser à ne pas couper les gaz).
Si j'insiste sur le refus de la fatalité, ce n'est pas pour rejeter la responsabilité sur le pauvre pilote qui a de toute façon été puni parce qu'il a eu mal, c'est que si on refuse la fatalité, et qu'on accepte d'avoir fait une connerie, au moins on a appris un truc, et on est devenu meilleur. Si on est tombé et qu'on accuse la chance, on n'a rien appris.
Ma dernière pelle c'était exactement ça : une chute sur le mouillé. J'ai longtemps cru que c'était la faute à pas de chance (oui, j'ai même accusé le gasoil), alors que j'ai finit par comprendre que j'ai coupé les gaz, que je m'étais redressé, et si je me suis vautré, c'est uniquement de ma faute. Et ben maintenant, quand je chasse de l'arrière en virage sous la pluie, j'ai un meilleur comportement, et je ne tombe plus. J'ai mis trois ans pour comprendre ça, et grâce aux explications de Max sur la gestion des gaz, pendant un CPM théorique comme celui que vous aurez dimanche. Et simplement en refusant la fatalité, je suis devenu un peu moins mauvais (et c'est déjà beaucoup).
ScorpiGibus a écrit :Le discours est peut-être légèrement anxiogène mais il a moins le mérite de freiner les ardeurs.
C'est cette "peur" qui me permet de me maitriser et d'éviter d'essorer la poignée ou de rouler n'importe comment.
Je tiens bien évidemment à mon permis, mais encore plus a ma vie.
Je suis d'accord que la peur n'est pas bonne car elle nous fait mal réagir face à l'imprévu.
Mais un motard qui n'a pas peur est un motard dangereux à mes yeux.
Encore une fois, lorsque j'emploie le mot "peur" je ne parle pas d'être tétanisé ou crispé, mais bien d'être conscient du danger.
Après, on est tous différent. Moi je ne fonctionne pas à la peur. Ce n'est pas la peur qui va me faire aller doucement sous la pluie. Mais je n'ai pas l'impression qu'on mette bien la même chose sous ce mot "peur". Bien entendu il faut être conscient de ce qui peut nous arriver. Il faut piloter sa moto avec conscience, sérieux, et humilité. Ça n'empêche pas bien entendu de faire des choses que la morale réprouve, mais il faut le faire en conscience de ses limites, des limites physiques, des conséquences, être sérieux dans son comportement (ce qui n'empêche pas de rigoler, on peut être sérieux sans se prendre au sérieux), et humble.
Pour moi être conscient du danger n'est pas "avoir peur", mais là on joue sur les mots. L'important est qu'on soit d'accord sur ce que ça recouvre. Je suis bien conscient que je risque la pelle ou l'accident à chaque sortie, qu'il y a des fois que je fais des trucs que je n'aurais pas dû, je le sais, mais je n'ai pas "peur" en tant que telle.
Et je ne veux pas, en tant que moniteur CASIM, avoir un discours anxiogène. Je ne pense pas que mon rôle soit de faire peur, mais d'informer, et d'expliquer. De faire prendre conscience de la réalité des choses. En particulier que rouler sous la pluie est beaucoup moins plantogène qu'on le croit. Oui, certes, ça
glisse plus que sur le sec, mais si on regarde bien, pas tant que ça (on est loin de glisser à chaque fois qu'on sort sous la flotte). Il y a cependant certaines règles qu'on devrait toujours observer, que si on les transgresse sur le sec ce n'est pas bien grave, mais que si on les transgresse sur le mouillé, la sanction est plus brutale.
ScorpiGibus a écrit :
Comme dit plus haut, j'éprouve systématiquement cette peur de me prendre une pelle ou une voiture, mais elle ne me paralyse pas pour autant et ne m’ôte en aucun cas le plaisir de conduire. C'est même elle qui m'évite de "taper une petite pointe pour voir ce que ça donne".
Oh ben la petite pointe, si c'est dégagé, c'est pas ça qui est le plus dangereux.